mardi 8 mai 2007

Azur et Asmar un bijou de l'animation française.


Michel Ocelot, le créateur de l'incontournable Kirikou(1998 et 2005) et de prince et princesse (2000), nous livre une fois encore un chef d'oeuvre d'animation. Un triomphe au cinéma avec plus de 1,6 millions de spectateurs, un conte d'une magnifique richesse visuelle et thématique.

Il était une fois Azur, blond aux yeux bleus, fils du châtelain, et Asmar, brun aux yeux noirs, fils de la nourrice, qui les élevait comme des frères, dans un pays vert et fleuri. La vie les sépare brutalement. Mais Azur n'oublie pas les compagnons de son enfance ni les histoires de fées de sa nourrice, au pays du soleil. Devenu grand, il rejoint le pays de ses rêves, à la recherche de la Fée des Djinns. Il y retrouve Asmar, lui aussi déterminé à trouver et gagner la fée, bravant tous les dangers et les sortilèges d'un univers de merveilles.

Avec son mélange 2D/3D, Azur et Asmar nous plonge dans un univers féerique aux couleurs chatoyantes. Le mélanges des langues l'explosion des couleurs, tout ça nous fait rêver et nous transporte par delà les mers, pour un conte de fée oriental, avec des personnages tous plus attachants les uns que les autres. Le message de paix et de tolérance, à la fois simple et fin, parlera aux petits comme aux grands.

Michel Ocelot confronte son esthétique, sa patte, à une nouvelle histoire. Car hormis le premier Kirikou, l'auteur a privilégié les petites histoires pour s'assembler en une grande. Considérons donc qu'Azur et Asmar est un second long métrage et le plaisir, le bonheur est le même que celui éprouvé pour Kirikou 1. Comme Miyazaki - avec qui il partage ce mélange entre la mythologie et le retour aux valeurs simples et familiales - il confirme son talent de narrateur, de messager, mais aussi son inventivité foisonnante pour illustrer ses contes à dormir debout.


De malédictions en miséricorde, de secrets en astuces, l'histoire pourrait être un jeu vidéo d'arcade. Mais Ocelot se sert des obstacles et des rebondissements pour nous parler de la diversité (et la richesse) culturelle, du respect des fois de chacun, de fraternité et de solidarité, de valeurs comme l'honnêteté et le métissage. Les superstitions y sont ridiculisées, les croyances primaires sources de souffrance individuelle. Fermer les yeux n'est pas une solution. Renoncer à son rêve ou sa dignité c'est comme mourir un peu.
Subjugués par ces épiceses orientales et les saveurs exotiques, nous suivons avec extase ces deux frères "de lait", un Kirikou angélique et pâle sans maman, et son alter ego, mauresque et sans papa. La morale fera en sorte que leur rivalité ne dure pas très longtemps. D'ailleurs le film est pour la paix des messages. Un savant Juif persécuté, une princesse enfantine et amusante, un père catholique autoritaire, une mère maternelle généreuse... Les autres rôles ne sont pas avares en caractères bien trempés. Et la réalisation fourmille de jolies idées.
Comme un cartoon aux enluminures dorées et précieuses, cette quête d'amour absolue, le cinéaste a refusé un compromis qui apporte une touche essentielle d'authenticité : en deux langues (le français et l'arabe), il n'est jamais sous titré. "Avec le ton que j'ai employé, il n'y a pas de problème de langue". Au visuel s'ajoute donc l'oral. L'écoute. Les visages expressifs. Derrière tous ces trompe-l'oeil, cet immense jeu d'illusions qui nous détourne le regard, masque nos opinions, nous aveugle, même, prend tout son sens lorsque seuls les gestes et la parole suffisent à s'exprimer. Ainsi l'on parle lion à un lion. Et l'on renvoie le salut (en arabe) si l'on veut être courtois.
Sur ces notions de base qui fondent les civilisations, Azur et Asmar, représente tout simplement un dialogue possible entre les cultures, les peuples. Un avenir plus optimiste que celui qu'on veut nous vendre sur la base primitive de la peur de l'autre. Ouvrir les yeux ou le coeur, s'ouvrir aux autres. Nous ne pouvons qutre conquis, petits ou grands. Baume aux neurones.
Car l'histoire et l'imaginaire, la musique de Gabriel Yared, l'usage malin de l'action comme des sentiments, de la fable innocente comme de la parodie satirique du français moyen, dévoilent une vérité : la recherche de la Fée n'est qu'un prétexte pour parler de notre appréhension du monde Arabe, dans toute sa beauté. Même si Azur et Asmar ne sont pas Kirikou, leur épopée nous charme et nous fait rêver à un monde meilleur. Sans gris.





Aucun commentaire: